Grégoire JOUCLAS (Inalco)
« L’analyse critique de la philosophie éthique occidentale et sa tentative de dépassement par WATUSJI Tetsurô 和辻哲郎 dans son ouvrage Ningen no gaku toshite no rinrigaku (L’Éthique en tant qu’étude de l’humain) »
Il s’agit d’un travail en cours pour le mémoire de M2. Mes recherches consistent pour l’instant à comprendre comment Watsuji intègre, critique et tente de dépasser la conception éthique des philosophes qu’il traite dans NGTR, ceci pour poser les fondations de son propre système éthique, « adapté » à la nation japonaise. Voici l’ordre d’analyse des auteurs par Watsuji, que nous respecterons dans cet exposé : Aristote, Kant, Cohen, Hegel, Feuerbach et Marx.
Dans une première partie je présenterai et contextualiserai succinctement l’auteur (Watsuji Tetsurô) et l’œuvre (Ningen no gaku toshite no rinrigaku, abrégé NGTR) sur lesquels je travaille. En me fondant notamment sur une postface de Koyasu Nobukuni 子安宣邦, je montrerai comment le séjour en Europe de Watsuji (1927-1928), sa lecture de Heidegger et son ouvrage Fûdo 風土 ont conditionné la création de NGTR, et plus notablement de Rinrigaku 倫理学.
Dans une seconde partie je ferai parler le livre NGTR, qui présente et critique dans l’ordre cité plus haut la philosophie éthique des différents auteurs. Il s’agira de résumer brièvement et chronologiquement la pensée de chaque auteur, et la position prise par Watsuji.
Dans une dernière partie j’offrirai un résumé synthétique (« en colonne ») de la position de Watsuji face à ces différents philosophes (ce qu’il retient, critique et tente de dépasser). Nous verrons que, grâce à cette analyse en colonnes, la position de Watsuji apparaît clairement et synthétiquement.
En conclusion, j’évoquerai rapidement la suite de mon travail : d’une part, approfondir la période dans laquelle s’inscrit Watsuji, pour mieux comprendre les enjeux historiques et intellectuels qui ont produit chez notre auteur cette insistance sur les concepts de ningen (l’humanité vue comme l’espace entre chaque individu) et d’aidagara (concept lié qui parle de l’« entrelien » qui unit les humains dans une communauté vivante liée à un milieu particulier). Je m’aiderai des ouvrages de spécialistes japonais reconnus comme Koyasu Nobukuni 子安宣邦 ou Karube Tadashi 刈部直. D’autre part, je chercherai à trouver un positionnement un peu original face aux auteurs précités, qui me permettra de justifier le présent travail de recherche.
KAWASATO Suguru (Inalco, Université de Nagoya)
« KOBAYASHI Hideo 小林秀雄, Bergson et Platon : ce qui dépasse l’individu dans la critique de Kobayashi »
Vers la fin des années 1950, Kobayashi a écrit trois critiques sur la Grèce antique. Le titre de ces critique est : « L’impression de la Grèce » (1954), « Les choses démoniaques » (1958) et « La République de Platon » (1959). Non seulement ces articles, Kobayashi compare, au début de son annexe de l’ouvrage Motoori Norinaga (1979), l’idée de ce dernier et celle de Platon que l’on trouve dans Phèdre.
Nous examinons selon trois points la problématique suivante : y a-t-il le même type de structure dans la pensée de Kobayashi et dans celle de Bergson, en ce qui concerne le dépassement de l’individu et l’élan vital ?
Nous verrons d’abord selon l’interprétation de Socrate par Kobayashi que l’unité des individus se construit à travers le dialogue grâce à la force du kotodama. De même, la parole indépendante de chaque individu est créée par cette même force. Cela va donc dans les deux directions : des individus à l’unification et inversement.
Ensuite nous travaillerons, par la philosophie de Bergson, le fait que chaque espèce est produite par le mouvement de l’élan vital, c’est-à-dire la totalité qui s’avance en créant la multiplicité des espèces. C’est seulement l’homme qui peut saisir, par son intuition, le mouvement inverse de cet élan vital en remontant vers l’unité.
Dans la troisième partie, nous analysons ce qui dépasse l’individu par Kobayashi en examinant le récit d’Er par Platon et la grande bête (la société). Dans le premier, Platon a fait apparaître le monde dont il a hérité tel qu’il est dans ces récits. Ces derniers ne viennent pas de sa propre interprétation mais de ce qui dépasse Platon lui-même. En ce qui concerne la bête, Kobayashi pense que, même si on essaie de la saisir en tant que telle, on ne peut pas la contrôler. Ici aussi la volonté de l’individu est dépassée car elle ne concernera jamais qu’une partie de la bête.
Il y a une structure similaire entre la pensée de Kobayashi et celle de Bergson. En considérant les trois parties, on peut conclure qu’il y a quelque chose qui dépasse l’individu dans la pensée de Platon selon Kobayashi : ce qui existe en tant que tel, avant l’inspiration d’un individu. Il s’agit de la même chose pour l’élan vital qui préexiste à l’homme.