mercredi 19 juin 2019

Conférence Samedi 29 juin 2019

14h30-18h00, Inalco, 65 rue des Grands Moulins, salle 5.21


Eddy DUFOURMONT (Université Bordeaux Montaigne)
« Rigaku 理学 et rigi 理義 : l’invention de la philosophie (politique) chez Nakae Chômin 中江兆民 au prisme du républicanisme »

Nakae Chômin est bien connu pour son œuvre multiforme puisqu’il fut journaliste, traducteur et homme politique. Chômin traducteur du Contrat social a largement occulté Chômin introducteur de la philosophie d’expression française. À l’occasion de la parution de notre ouvrage Rousseau au Japon. Nakae Chômin et le républicanisme français (1874-1890), nous souhaitons présenter nos résultats de recherche, qui ont permis de mettre en lumière les mécanismes et les enjeux de cette démarche de traduction. Du traitement de l’Histoire de la philosophie d’Alfred Fouillée à l’utilisation de Notions de philosophie (Jourdain) ou de Matérialisme (André Lefèvre), Chômin a fait preuve d’une démarche cohérente, cherchant à utiliser un terme du Menciusrigi 理義 (Raison et justice), pour mieux penser la philosophie (rigaku 理学 chez Chômin) qu’il souhaitait introduire au Japon. Tout un pan de cet âge premier de la philosophie japonaise moderne se révèle ainsi.

KURODA Akinobu (Université de Strasbourg)
« Être passible ou la capacité de souffrir. Source affective de la philosophie chez Nishida Kitarô et Michel Henry »

« Je souffre, donc je suis. » Cette thèse énoncée par le philosophe russe Nicolas Berdiaev (1874-1948), dans son ouvrage publié en 1947, Dialectique existentielle du divin et de l’humain, aurait pu l’être par Nishida Kitarô et Michel Henry comme celle en laquelle se condense la caractéristique respective de leur philosophie.
Notre démarche consiste à faire apparaître la philosophie d’Henry au miroir de la philosophie de Nishida sous différents angles, tout en suivant le fil conducteur qu’est la notion de vie. La vie, selon Henry, est une capacité infinie de se supporter et de se souffrir elle-même. C’est dans cette optique que nous présentons une confrontation entre Nishida et Henry.
Autour de problèmes qui se posent relativement à l’épreuve de la souffrance comme capacité fondamentale de l’humain, nous pouvons bien voir comment s’articulent l’affinité et la divergence qui existent entre la philosophie du monde de la vie historique et la phénoménologie de la vie. Il s’agit de savoir en quoi consiste exactement cette affinité indéniable entre les deux et où se trouve effectivement la divergence qui les fait s’opposer de façon apparemment irréconciliable.
Les thèses posées par Henry à propos de la vie peuvent être considérées comme un grand défi lancé à la logique de la vie historique de Nishida, dans laquelle nous trouvons la forme la plus élaborée de la philosophie de Nishida. En relevant ce défi du philosophe de l’auto-affection, nous nous proposons d’aborder d’une manière interrogative la logique de la vie historique du philosophe japonais. Par là, nous entreprenons de donner à cette logique une expression plus rigoureuse, à certains égards, afin de trouver une voie qui la fasse se dépasser au-delà du champ exploré par le philosophe japonais.
Après avoir présenté brièvement quelques points cruciaux de la pensée de la vie de Michel Henry, nous allons dégager les questions pouvant s’adresser à la pensée nishidienne, afin d’interroger de manière critique la position henryenne à partir de celle du dernier Nishida, et, enfin, de faire resurgir la question fondamentale laissée en suspens par nos deux philosophes, de savoir où se situe exactement l’espace intérieur du corps propre en lequel la souffrance s’éprouve elle-même.